Compte-rendu de l'entretien de Mmes Salez et Morgan avec M. Brédif dans le cadre de l'audit patrimonial du Plateau de Saclay commandité par le Conseil Général et l'association "la Terre et la Cité".





--- INFORMATIONS VENANT DE M. BREDIF ---

1 - L'audit, son contexte et sa démarche.

"La Terre et la Cité" est une émanation de la "Société de l'Agriculture et des Arts" créée il y a 250 ans. Cette association se
"réactive" à chaque fois que de nouveaux défis se posent à l'agriculture. Depuis 2 ou 3 ans, l'agriculture en Ile-de-France est l'objetde questionnements sur son devenir. Jacques Leureau (pdg de la Ferme de Gally dans la plaine de Versailles), conscient des difficultés de ses confrères a désiré démarrer une action et a trouvé un écho favorable à ses idées au Conseil Général en la personne de M. Huchon. C'est ainsi que l'audit a été lancé. Son but est de recueillir et d'analyser les attentes des différentes composantes de la population locale concernant le devenir de l'agriculture dans 4 territoires d'Ile-de-France (dont le Plateau de Saclay). Chaque territoire s'est doté d'une association pouvant recevoir le financement du Conseil Général.

La démarche adoptée se fait en 3 étapes :
 

1 - Entretiens avec 50 "grands acteurs" : élus, administration, associations, scientifique, tourisme, agriculteurs,etc..
2 - Entretiens avec 50 personnes n'ayant pas de pouvoir décisionnaire sur le Plateau.
3 - Regroupement en 4 familles d'"acteurs" : agriculteurs, cadre de vie, environnement l'eau et sa gestion architecture, recherche, entreprises...
4 - Unifier les 4 projets qui ressortent de cet audit en un projet d'ensemble, à la lumière de la gestion du vivant et de l'agriculture.


Ce projet d'ensemble sera ensuite remis aux élus locaux.

2 - Le Plateau de Saclay : un enjeu national

De tous temps, le Plateau de Saclay a cristallisé les ambitions de l'Etat (Louis XIV l'a fait drainer pour alimenter les Grandes-Eaux de Versailles, en 1947, installation du CEPR, en 62, le CEA... et aujourd'hui le projet est celui d'un centre d'envergure européen.

On a même parlé de l'aménagement du Plateau de Saclay en terme de "fractal" : "îlot" dans l'"Ile"-de-France, ce qui s'y passe pourrait, aux dires de certains, faire "boule de neige" et affecter l'ensemble des orientations prises pour le territoire français. Un équilibre sera-t-il trouvé entre urbanité et ruralité ou continuera-t-on à privilégier un développement essentiellement technologique et scientifique ?

L'idée sous-jacente au développement techno-scientifique du Plateau est qu'il n'y a pas de synergie suffisante, en France, voire en Europe, entre les différentes branches de la Recherche et qu'il faut donc les rassembler dans un même espace géographique.

Actuellement, cette synergie ne peut pas se faire car les chercheurs ne disposeraient pas de "lieux de vie" pour se rencontrer et se connaître.

Si l'aspect technologique et recherche de point est largement valorisé à l'heure actuelle pour la région Ile-de-France, l'agriculture reste à contrario le "parent pauvre". Si tout le monde s'accorde à dire qu'il faut préserver les espaces naturels de notre région, seuls les espaces boisés sont l'objet d'un effort de protection.

3 - Les autres "sensibilités" qui apparaissent au fil des entretiens

A - L'avenir est envisagé comme passant obligatoirement par de constantes avancées dans les domaines technologiques et
scientifiques; mais il existe une prise de conscience que la science elle-même aura besoin demain de terres arables.
Ainsi, on parle beaucoup de "chimie verte", "énergies vertes"... et même production de nourriture pour les poissons, l'océan se vidant de ses ressources ! Il faut donc préserver notre capital de terres arables.

B - Beaucoup d'élus et de "décideurs" (ou de conjointes de décideurs !) sont tout de même conscients de la valeur du patrimoine rural du Plateau et "freinent" l'avancée du "bétonnage".

C - La population, de par sa nature (provinciaux ne voulant pas s'installer à Paris même ou Parisiens "fuyant" la capitale) est attaché à l'aspect "provincial", "rural" du Plateau et de ses vallées : si on continue le développement et l'urbanisation actuels, c'est Paris et sa banlieue qui continuent leur avancée au détriment des espaces naturels et d'un certain art de vivre.

D - Les agriculteurs sont, parmi tous les "acteurs", ceux qui semblent être le plus moralement fragilisés. Il leur est difficile de cohabiter avec des citadins pressés et peu compréhensifs (Quand un 4X4 s'embourbe dans un champ le conducteur s'en prend souvent à l'agriculteur qui vient pourtant l'aider, files de voitures qui klaxonnent derrière les engins agricoles, peu de reconnaissance pour leur travail, manque de confiance et de motivation...)

E - Rassembler une même population (ici, scientifique) dans un espace géographique restreint fait de celui-ci un ghetto. Notre région deviendrait une sorte de "Silicon Plateau", sans mixité de population. Cette concentration est néfaste pour les comportements humains et la vie sociale : certains interviewés se plaignent de ne pas avoir suffisamment de temps pour éduquer leurs enfants, pour leurs loisirs; les institutrices font état de comportement "asocial" même chez de très jeunes enfants et en particulier dans les quartiers à fort "coefficient intellectuel" !
 
 

NOTRE APPORT PERSONNEL A CETTE ENQUETE

Nous avons particulièrement insisté sur notre désir de voir stopper l'urbanisation du Plateau et le maintien de l'agriculture. Nous avons exposé tous nos "projets alternatifs" (cf dossier de présentation aux agriculteurs).

Nous envisageons le Plateau comme un lieu de vie particulier, une "oasis" de nature et de ruralité aux portes de Paris. Les ressources et le patrimoine de ce lieu étant largement inconnus de la population locale (100 000 citadins), il faut absolument développer les moyens d'accès "écologiques" (navettes au départ des gares, des centres-villes), sentiers, randonnées à pied, à vélo, à cheval... qui permettraient une découverte de toutes les activités présentes et à venir.

Nous sommes conscientes que notre démarche s'oppose radicalement à une certaine tendance économique et politique mais le "développement" du Plateau n'est pas inéluctable : les nombreuses "forces" d'action qui vont dans ce sens n'arrivent pas, pour le moment à concrétiser leurs projets. D'autre part nous opposons à cette vision que nous estimons parcellaire, notre aspiration à trouver un nouvel équilibre de vie en société où les différents domaines d'activité seraient véritablement au service du mieux-être humain et d'un développement authentique. Les maux de notre société prennent justement racine dans la concentration, le manque de contact avec la nature et les vraies valeurs de la vie, la "ghettoïsation" des populations, l'exclusion de toute appréhension du monde qui ne serait pas conforme à la vision technocratique de la société. A quoi bon une telle poussée dans les domaines purement intellectuels si c'est pour aboutir à un tel mal de vivre ? : la plus forte concentration au monde d'enfants autistes se situe à Silicon Valley (plus d'1/3 de la population enfantine), la France est la championne du monde de consommation de tranquillisants, de plus en plus de jeunes enfants se suicident (cas d'enfants de 8 ans), déprimes d'enfants de 3 à 5 ans, violence à l'école...

Nous avons aussi évoqué les caractéristiques du Plateau de Saclay dont la richesse nous interdit toute décision aveugle allant dans le sens de plus d'urbanisation :